Changement de la reine d’une colonie.

Les reines de nos ruches, soumises à de nombreux stress: chimiques, climatiques … sont opérationnelles moins longtemps qu’avant. On estime qu’une bonne reine doit être capable de pondre environ 2000 œufs par jour pour, au moins, compenser les 2000 abeilles qui meurent chaque jour.
Nous les changeons donc toutes les années et demie ou deux ans.
C’est un processus par étape que nous mettons en œuvre. Première étape, enlever la vieille reine. Suite à cette action, les abeilles vont se sentir « orphelines », sans le moteur de cohésion chimique qu’est la reine d’une colonie.
Elles vont alors construire des cellules royales et élever à la gelée royale les dernières larves pondues par la vieille reine.
C’est à ce moment que nous intervenons pour casser ces cellules. Comme nous souhaitons introduire une reine à nous, il est hors de question de faire émerger une reine dont nous ne connaissons pas les caractéristiques !
Les abeilles sont alors dans une situation désespérée: plus de reine et plus de possibilité d’en faire naître une nouvelle car les larves restantes sont trop vieilles: le timing est dépassé !
Nous leur présentons alors la nouvelle reine dans une petite cagette fermée par un bouchon de sucre.
Et là, c’est la fête au village. Elles se précipitent sur la cagette pour humer les phéromones de cette nouvelle reine qui leur est fournie: c’est le processus de l’acceptation. Quand on voit ce type de réaction d’une colonie, on est sûr que cette reine sera bien choyée et acceptée.
Car il arrive que ces dames fassent les difficiles et ne veulent pas de la nouvelle arrivante. Alors là, commence un calvaire pour cette dernière: harcèlement, manque de nourriture, manque de soins. Et cela se termine immanquablement par la mort de la reine par manque de soins.
D’autres fois, le stratagème est plus pervers: la colonie laisse la reine pondre quelques milliers d’œufs. Puis cette reine est poussée à la mort de la manière précédente. Et les abeilles vont élever une nouvelle reine, plus conforme à ce qu’elles veulent, sur les dernières larves.

La parthénogénèse chez l’abeille.

Lors de la visite de printemps, nous avons quelquefois la mauvaise surprise de trouver une colonie sans reine. Le constat saute immédiatement aux yeux quand on découvre du couvain mâle sans aucune trace de couvain d’ouvrière. Cette colonie est condamnée, au moins d’un point de vue apicole : elle va irrémédiablement s’effondrer et soit tomber malade, soit se faire piller. En tout cas, elle va vers la mort. Pour l’espèce, la colonie bourdonneuse de fin de saison a comme avantage de produire quelques mâles pour des fécondations d’urgence mais celle de printemps a peu d’intérêt.

Nous pouvons essayer quelques  tentatives de sauvetage :

  • Soit mettre un cadre de ponte fraîche issu d’une autre colonie.
  • Soit y mettre une très vieille reine, avec peu de ponte et surtout des phéromones peu puissants qui peut en douceur prendre la place de la pondeuse et permettre ensuite un remérage.
  • Toute tentative d’y mettre une jeune reine vaillante est vouée à l’échec : l’ouvrière pondeuse étant très agressive ne lui laissera aucune chance de survie.

Mais, globalement, pourquoi perdre du temps à sauver une colonie extrêmement fragilisée et qui peut être une source de contamination dans le rucher. C’est la raison pour laquelle, si on découvre le phénomène tôt, on secouera la colonie à plusieurs centaines de mètres du rucher afin que l’ouvrière pondeuse ne vienne désorganiser avec sa troupe une autre ruche. Si le constat est plus tardif et que des moisissures ou autres symptômes alarmants sont visibles, une mèche de souffre viendra clore cette histoire.

Mais, très rarement, un miracle se produit. Une colonie clairement identifiée comme bourdonneuse se retrouve avec une vraie reine qui pond un couvain mixte. Phénomène très rare bien entendu. Que s’est-il donc passé ?

La première hypothèse serait de dire que des ouvrières seraient allées voler des œufs dans d’autres ruches : hypothèse jamais validée.

Mais une autre hypothèse s’avère plus plausible : la clé se trouve peut-être dans les deux opérations qui participent de la vie et de la reproduction des cellules, particulièrement des cellules sexuelles : la méiose et la mitose. Tous les individus sont diploïdes, les abeilles aussi : nous possédons 2 paires de chromosomes. Lorsque nos cellules se divisent, chaque paire de chromosomes se divisent aussi pour redonner deux nouvelles cellules avec chacune 2 paires de chromosomes. C’est ce qu’on appelle la mitose.

Mais, pour les cellules sexuelles, ce processus n’est pas possible car, après la fécondation, on se retrouverait avec des œufs contenant chacun 4 paires de chromosomes.  Impossible , ce serait une chimère!!

Donc la méiose des cellules sexuelles commence par une mitose incomplète : les 2 paires de chromosomes se dédoublent mais sans séparation physique de l’ovule,  puis chaque paire de chromosome se sépare et on aboutit à 4 entités haploïdes que l’on va appeler globules polaires. Il n’y a pas de division physique et les globules restent dans la même enveloppe. Habituellement, 3 de ces globules  dégénèrent et sont expulsés après la fécondation. Ici, dans ce cas, un globule haploïde va recevoir le jeu de chromosomes d’un autre globule haploïde qui jouera le rôle du spermatozoïde et cette opération redonnera un œuf diploïde qui sera le point de départ d’un nouvel individu femelle, future reine.

Ce phénomène très particulier s’appelle la parthénogénèse thélytoque. Il est très rare et mériterait que des études plus poussées soient réalisées sur nos races d’abeille.  Il a été observé par des scientifiques et fait partie du comportement habituel de l’abeille du Cap. On peut supposer que, dans le génome de nos abeilles, il soit présent de manière dormante, plusieurs gènes récessifs,  et que quelquefois , au hasard de la loterie génétique, il s’active.

L’essaimage: une révolution dans la ruche .

Nous arrivons en pleine période d’essaimage. Un peu partout, on voit des abeilles traverser le ciel et venir s’accrocher dans les jardins. Mais que se passe-t-il donc pour que les abeilles aient des envies d’ailleurs ?
Il y a quelques semaines, le miel rentrait en grande quantité dans les ruches. Partout dans la nature, les floraisons explosaient : les saules, pissenlits, arbres fruitiers ….. Du coup, la demande en butineuses est devenue très forte et la pression sur la ponte de la reine s’est accentuée. Celle-ci pond, pond jusqu’à 2000 voire 3000 œufs par jour. Le nombre d’abeilles devient rapidement exponentiel pour arriver à des chiffres impressionnants : 60, 70, 80000 voire plus. Beaucoup de miel, beaucoup d’abeilles, beaucoup de larves, la colonie va devenir ingérable d’autant plus que les hormones de cohésion que diffuse la reine habituellement, se diluent dans l’atmosphère sur-ventilée de la ruche et deviennent moins efficaces.
Les abeilles vont alors prendre une initiative révolutionnaire.

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